Contrepet au pays du P’tit Quinquin
La sous-commission des probabilités du Collège de ’pataphysique s’appuie sur Le Robert pour faire remonter l’origine du mot « contrepèterie », trois siècles avant la naissance d’Alfred Jarry. Le « contrepet » est beaucoup plus récent : en 1957, Luc Étienne qui tient depuis peu la rubrique « l’Album de la Comtesse » dans Le Canard enchaîné publie L’art du contrepet. « Pour cette science ou pour cet art, assez analogue à celui du contrepoint, nous avons forgé, affirme-t-il, le nom de contrepet ». Le mot lui-même apparait pourtant imprimé, en 1948, dans les statuts du Collège qui prévoient la création d’une chaire fondamentale de contrepet. Et bien avant cette date, Julien Torma dans
Le coeur net, poème daté du 25 juillet 1922, avait employé le vocable à deux reprises :
« Le chibre du clocher de Voncq mire un contrepet divin : Vire Moncq ! Goître adieu dans les lieux Et contrepet sur terre aux Zobs de bonne volonté »
« Comme dans le cas du mot ’pataphysique, la date de naissance réelle de contrepet se perd dans les brumes de l’oralité ». La sous-commission des probabilités, dans le n° 54 des Monitoires (15 décembre 1999 vulg.) émet l’hypothèse d’une transmission orale de cette notion entre Julien Torma et Luc Étienne. Cette possibilité se fonde sur un certain nombre d’arguments. Notamment sur le fait que Luc Étienne mettait volontiers en parallèle sa biographie et celle de Torma. Le Régent de contrepet fut, par exemple, victime d’un accident de montagne en 1952, dans le massif de l’Oetzal, près de Vent où Torma avait disparu en 1933. La même sous-commission note aussi que Julien Torma et Luc Étienne purent se rencontrer à plusieurs occasions : à Douai, à l’automne 1928, à Charleville, ou encore… à Lille où tous deux séjournèrent de 1927 à 1930. La piste lilloise serait la plus vraisemblable : en 1930, Luc Étienne habitait rue du Sec-Arembault et en 1932, rue du Court-Debout. « Quant à Julien Torma, au printemps 1929, il faisait adresser son courrier, rue de l’ABC, à Lille. Peut-être y séjourna-t-il toute l’année 1930 (…) il était à nouveau à Lille en mars 1932 ». Toutes ces rues, on le sait, sont proches les unes des autres. Ainsi les difficultés avancées par la municipalité vont inciter ceux qui réclament une rue en hommage à Torma et Luc Étienne à étendre leur dévolu sur d’autres rues, places ou squares qui ne seraient pas trop éloignées de la rue de l’ABC. Pourquoi le quartier Saint-Sauveur, en pleine mutation urbanistique, à proximité duquel se développa jadis « l ’art du contrepet » ne pourrait-il pas s’enorgueillir de rues Julien Torma et Luc Étienne ? Mais aussi d’une place du Contrepet ou d’un site (salle de spectacle ou de sport) dédié aux pratiques hygiéniques contrepétatoires. Ce quartier se réapproprierait alors l’un des moments déterminants de son histoire, comme l’esprit du jeu qui fait déjà l’actualité de la gare Saint-Sauveur. Restera tout de même encore à célébrer la femme du chef de gare qui, prétend Luc Étienne, lui laissa Le Chaix pendant une minute sur le quai.
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